CHIRURGIE DES TUMEURS CUTANEES

Les tumeurs cutanées sont une pathologie fréquente et concernent tous les âges. Le diagnostic est habituellement posé après une consultation auprès d’un dermatologue. On distingue les tumeurs bénignes et les tumeurs malignes. L’indication de l’exérèse d’une lésion bénigne peut être esthétique et/ou selon la localisation (exposition à des traumatismes répétés, gène…). Les principales tumeurs bénignes sont : les verrues, les kystes, les kératoses, les lipomes, les nævus ou grains de beauté. Après exérèse, l’analyse de la lésion est systématique pour confirmer le diagnostic.

Les tumeurs cutanées peuvent également être plus rarement cancéreuses. Les principales tumeurs malignes cutanées sont le mélanome, les carcinomes de l’épiderme. L’exposition solaire est un facteur prédisposant tout comme le phototype du patient, c’est-à-dire sa couleur de peau et sa capacité à bronzer. Ainsi, les patients à phototype clair sont plus exposés que les patients à phototype foncé.

1.1 LES TUMEURS BENIGNES

Ce sont des masses ou une région de peau anormales qui ne se propagent pas. En fonction de leur localisation dans la peau ou de leur constitution, on distingue :

  • Les tumeurs aux dépens des mélanocytes : grains de beauté
  • Les tumeurs de l’épiderme : verrues séborrhéiques, kératoses, verrues…
  • Les tumeurs aux dépens des cellules pileuses : kystes sébacés, kystes épidermiques, kystes trichilemnaux (loupes du cuir chevelu)…
  • Les tumeurs du tissu conjonctif : fibromes, histiocytofibromes…
  • Les tumeurs du tissu graisseux : lipomes
  • Les tumeurs aux dépens des vaisseaux : angiomes
  • Les tumeurs aux dépens des cellules nerveuses : neurofibromes
  • Les dépôts de graisse : xanthélasma (au niveau des paupières surtout)

1.2 LES TUMEURS MALIGNES

1.2.1 LE MELANOME

Le mélanome est une tumeur dont la fréquence est en constante augmentation (l’incidence double tous les deux ans) et qui représente 1% de tous les cancers. On compte 5 à 8 nouveaux cas pour 100 000 habitants par an. Les facteurs favorisants sont l’exposition au soleil (dont les coups de soleil pendant l’enfance) et une prédisposition familiale. La plupart des mélanomes apparaissent sur une peau sans nævus. Parfois, il peut survenir sur un nævus qui se modifie. Les critères faisant suspecter la modification d’un nævus en mélanome sont les critères ABCDE :

  • Asymétrie,
  • Bords irréguliers,
  • Couleurs variées,
  • Diamètre > 5 mm,
  • Evolutif.

On distingue plusieurs formes de mélanomes : SSM (mélanome à extension superficielle), nodulaire, acral (mains, pieds, ongles), sur mélanose de Dubreuilh et achromique (non coloré).

Une exérèse chirurgicale est réalisée dans un premier temps avec des marges d’exérèse réduites.

Dans tous les cas, la prise en charge est discutée en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) afin d’assurer au patient la meilleure prise en charge possible avec des recommandations actualisées au gré des progrès de la science. La RCP réunit entre autres dermatologue, oncologue, chirurgien, anatomopathologiste et permet l’établissement d’un plan de soin personnalisé optimal.

Après confirmation du diagnostic après examen anatomopathologique, une nouvelle exérèse peut être proposée avec des marges définies par l’extension en profondeur de la lésion (indice de Breslow). Elle peut s’accompagner d’une analyse du ganglion susceptible de drainer les cellules cancéreuses (ganglion sentinelle). Le ganglion sentinelle est le premier ganglion du territoire de drainage du mélanome. Son exérèse permet son analyse afin de savoir s’il contient des cellules du mélanome et est réalisée lors de la reprise chirurgicale de la cicatrice du mélanome. Elle est facilitée par une injection de produit légèrement radioactif et par l’injection d’un colorant (bleu Patenté) sur le pourtour de la cicatrice du mélanome. Habituellement, un à trois ganglions sont prélevés ce qui permet de minimiser les risques d’œdème lymphatique post opératoire (lymphœdème). Attention, la présence d’un ganglion sentinelle à la scintigraphie est tout à fait normale et traduit la concentration du produit radioactif et ne présume en rien de son atteinte ou non par les cellules du mélanome.

En cas de mélanome, un examen clinique au niveau de la cicatrice mais également au niveau du corps entier est nécessaire, 2 à 4 fois par an les premières années puis une fois par an, à vie. Une photoprotection est également systématique.

 

1.2.2 LES CARCINOMES DE L’EPIDERME

On distingue deux types de carcinome de l’épiderme : les carcinomes basocellulaires et les carcinomes spinocellulaires.

1.2.2.1 CARCINOME BASOCELLULAIRE

Les carcinomes basocellulaires sont les cancers les plus fréquents en France et représentent 60% des cancers cutanés avec une incidence de 70 pour 100 000 habitants par an. L’exposition au soleil est le principal facteur favorisant et il survient sur peau habituellement saine. Le diagnostic peut être suspecté devant une lésion qui ne guérit pas avec des perles en périphérie ou des télangiectasies (petits vaisseaux sous cutanés visibles). On distingue plusieurs formes cliniques. L’évolution est caractérisée par un potentiel invasif local mais ne métastase pas. Une biopsie permet de confirmer le diagnostic. La chirurgie est le traitement principal mais d’autres solutions peuvent s’envisager chez les patients fragiles avec des petites lésions.

1.2.2.2 CARCINOME SPINOCELLULAIRE

Les carcinomes spinocellulaires représentent 20 % des cancers cutanés avec une incidence de 5 à 20 pour 100 000 habitants par an. L’exposition au soleil est également un facteur prédisposant et les lésions apparaissent sur des lésions cutanées préexistantes. On les suspecte devant une lésion cutanée ou muqueuse présente depuis plusieurs années qui se modifie (infiltration, ulcération, épaississement, saignement…). Une biopsie permet de confirmer le diagnostic. Contrairement au carcinome basocellulaire, il existe un risque de dissémination métastatique. La chirurgie est le principal traitement.

1.2.3 CAS PARTICULIER DES TUMEURS PROFONDES

La prise en charge des tumeurs profondes est particulière car il existe un risque pour certaines de correspondre à un sarcome des tissu mou (STM). Il s’agit de tumeurs rares (3000 à 4000 nouveaux cas par an en France, 1 tumeur sur 200 des tissus mous, 1% des tumeurs malignes) mais à ne pas méconnaitre car la prise en charge est spécifique. Il existe de nombreux types de sarcomes mais ils partagent globalement les mêmes principes de prise en charge à savoir une biopsie avant chirurgie et une discussion de prise en charge au sein du réseau NetSarc. Le réseau NetSarc est le réseau de référence clinique pour la prise en charge des sarcomes et est coordonné par 3 centres coordinateurs qui collaborent avec 25 centres experts. Le Centre Jean Perrin est le centre référent pour la région Auvergne (lien https://netsarc.sarcomabcb.org/public/Liste_RCP_NETSARC.pdf).

Une tumeur de type sarcome doit être évoquée lorsqu’au moins un des critères suivants est retrouvé à l’examen clinique et à l’échographie :

  • Toute tumeur profonde de plus de 5 cm à l’imagerie,
  • Toute tumeur profonde (sous aponévrotique),
  • Toute tumeur évoquant un hématome persistant, a fortiori sans facteur de risques.

Dans ce contexte, une imagerie type IRM doit être réalisée et le dossier discuté au sein du réseau NetSarc.

Les caractéristiques radiologiques des tumeurs qui doivent imposer une discussion sur la nécessité de réaliser une biopsie avant toute chirurgie sont :

  • Diamètre de plus de 50 mm,
  • Localisation sous-aponévrotique,
  • Contours irréguliers ou lobulés,
  • Présence de parois et septas intra tumoraux irréguliers et épais,
  • Hétérogénéité sur les séquences T1 et T2,
  • Prise de contraste précoce et prolongé,
  • Présence de zone nécrotique.

    Le risque qu’une tumeur profonde de plus de 5 cm soit cancéreuse est de 15% environ. Il ne faut pas être surpris si le chirurgien préfère faire réaliser des examens complémentaires et sollicite un avis sur l’indication d’une biopsie avant de retirer la lésion.

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